Re: Cette semaine dans le journal de Spirou j'ai aimé...
Posté : dim. 24 nov. 2024 17:50
Numéro 4415 du 23/10/2024
Ici un aperçu du numéro: https://www.spirou.com/actualites/somma ... les-livres
En octobre est sorti l’album Les petits métiers méconnus “imaginés par Vincent Zabus, mis en images par » de nombreux dessinateurices, un(e) par histoire. Vincent Zabus expliquait (Spirou 4410) que des histoires courtes lui ont permis de travailler « avec des auteurs qui n’étaient pas disponibles pour un album entier », et c’est Alfred qui a réalisé l’histoire de cette semaine, qui a servi à compléter l’album. Sa couverture pour ce numéro de Spirou est tant romantique que romanesque, pour une des meilleures histoires de cette série née, expliquait Zabus, en 2022 du confinement dû au Covid : une libraire y est « vendeuse d’invendus », insérant à la sauvette des pages de ceux-ci dans des best-sellers, leur donnant une seconde chance inespérée. J’ajoute que travailler avec de multiples auteurices est un procédé qui sied bien au dramaturge et metteur en scène de théatre qu’est aussi Vincent Zabus, qui par ailleurs précisait (Spirou 4349) que sa première émotion en BD a été deux histoires de Spirou de Franquin, fondamentalement dissemblables et pourtant réunies dans le même album, Sur le ring « avec Poildur », et la teintée de racisme (plus exactement de paternalisme) mais foncièrement humaine Chez les pygmées, comme quoi les œuvres mêmes anecdotiques des grands auteurs offrent des ressources inépuisables. D'Alfred, je soulignerai sa façon d’utiliser la couleur comme dessin, qui lui permet entre autres de créer des liens inattendus, comme ici entre deux personnages dont le nez est fait d’un trait rouge, et me permet d’attirer l’attention sur la touchante note de bas de page de la seconde histoire courte du numéro, Plus blanc que blanc de Marc et Pep, de Nicoby, qui rend hommage à Philippe Oiry, son coloriste (et celui de Bouzard, Fabcaro, et bien d’autres, dont son propre fils Pierre Jeanneau pour Connexions, sélectionné à Angoulême), décédé en août dernier. Dans cette histoire des détectives privés, l’enquête n’apparait que dans la dernière page, et n’est de plus en plus dans cette série qu’un révélateur des relations entre les personnages et la société (Marc et Pep sont vus par un responsable de supermarché comme un « petit couple de mecs »). Tout le contraire, et ce serait a priori surprenant selon ce à quoi Dodier nous a habitué, du cinquième chapitre de Perpétuité, l'histoire en cours de JKJ Bloche, qui consiste en la recherche sur cinq pages quasi muettes d’un homme dans un immense maison quasi déserte, structure éminemment angoissante. Mais JKJ Bloche, comme toutes les bonnes séries noires, sait alterner et méler véritable récit et chronique sociale. Si Dodier peut se situer dans la tradition du polar, car ce genre se doit toujours de refléter la société, ce n’est pas le cas du récit d’aventure classique, qui ne marche plus que difficilement au premier degré, mais Fabcaro et Fabrice Erre dépassent dans Décalécatlàn par leur humour la trop souvent vue parodie de l’aventure exotique contaminée par la civilisation. Louca est toujours absent de ce troisième chapitre de La coupe du Griffon, où Bruno Dequier continue à présenter comment les autres personnages ont évolué durant ces années. Faire vieillir les personnages est en effet une des meilleures voies qu’ont trouvées les auteurs de séries d’aventures pour renouveler l’intérêt des lecteurices. La dernière histoire courte du numéro est un Capitaine Anchois où Floris réussit à fourrer dans trois pages piraterie, mythologie antique, arthurienne, et junk food, avec de plus un clin d’œil (volontaire, ou défaut de traduction?) aux jeux de rôle, la wyverne y apparaissant sous ce nom n’étant que le nom anglais ou des jeux de rôle HF de la vouivre.
Dans les gags, le Kid Paddle numéro 742 serait un gag de Game over ne serait l’apparition muette de Kid en dernière case, je me demande ce qui a décidé les auteurs Midam, Venet, Adam et Angèle à en faire un gag de Kid Paddle. Muet aussi le Crash Tex de Dab’s et Gom pour une version dégénérée de Guillaume Tell. Nena et Maria-Paz font une belle planche d’Otaku où les quatre strips sont en plan fixe pour faire ressortir le jeu de mise en page et le gag final, Zimra et Romain Pujol font une version accélérée du vieillissement des personnages dans Psychotine, quant à Ced, Frantz Hofmann et Annelise, ils font un gag de Kahl et Pörth entièrement basé sur le cadrage, réussi car la scène précédant la chute tient en elle-même par les dialogues et le dessin et ne fait pas artificiellement jouée ou étirée uniquement pour amener le gag. Toujours de bons conseils techniques dans La leçon de BD de Marko, amusante parodie de Lucky Luke chez Gary C. Neel de Gorobei et encore Ced, rappel nostalgique du libraire de Animal lecteur ! dans Le strip dont vous êtes la star de Libon et Sergio Salma, et suite de la série de Titan Inc. sur le cynisme rétrograde du capitaine, auquel Paul Martin et Manu Boisteau ajoutent cette semaine celui sardonique de Kata, la DRH. Humour noir dans Fish n chips de Tom, jeux de mots absurdes dans Des gens et inversement de Berth et dans Les Fifiches du Proprofesseur de Lécroart, celui-ci touchant juste sur un des plus importants débats de société actuels. Dans Dad flashbacks de Nob, Roxanne, à peine née, montre déjà sa personnalité ; paradoxe de la BD en magazine : cinq semaines d’attente est long pour qu’un personnage naisse enfin, mais est vraiment court pour une grossesse…Et on ne verra sans doute pas la maman de Bébérénice puisque la publicité pour l’album Dad flashbacks ne montre en couverture que les trois filles ainées. Autre publicité intéressante, pour La mémoire du futur, le Spirou et Fantasio de Schwartz, Abitan et Guerrive, avec Spirou et fantasio se reflétant dans un globe sur fond rouge, dessin bien plus réussi car à la fois plus révélateur et plus intrigant, y compris graphiquement avec ses ombres, que la couverture définitive fourre-tout (sauf Seccotine, pourtant autant si pas plus essentielle que Spirou et Fantasio).
Dans le rédactionnel, Fred Neidhart se révèle un scénariste très rigoureux dans Bienvenue dans mon atelier, à l’opposé de ce que pourrait laisser croire la réputation de fumiste qu’il joue à laisser trainer dans Spirou depuis quelques années, montre une relation forte avec Spirou, « dans l’ADN familial », en dépit de ses parodies et canulars d’apparence irrespectueuse, et annonce une nouvelle histoire des Tuniques bleues toujours avec Lambil. En direct du futur annonce la suite du Soda Résurrection, dix ans après la première partie, attente due au décès de Tome, toujours dessiné par Dan, et scénarisé pour la fin par deux scénaristes vedettes de Spirou période Tinlot, Zidrou et Falzar.
Enfin, L’édito des Fabrice et leur délire verbal, les Jeux de Lerouge, sur « la panique dans un magasin où la bande à Spirou (une multitude de personnages) veut trouver chaussure à son pied» tandis que l’inspecteur mène son enquête, et les témoignages de différents auteurs imaginant d’« inattendus gagne-pain » en marge des Petits métiers méconnus répondent tous à la fantaisie poétique qui baigne ce numéro : en dehors de Lucy Mazel, Carbone et Damien Cerq, qui imaginent des métiers impossibles dans l’esprit de la série, les autres auteurs, Libon, Alfred, Nob, Jousselin, ne font qu’exprimer ce qu’ils font dans leur vie quotidienne, et retranscrivent dans leurs BD (lire ici: https://www.spirou.com/bonus-de-la-reda ... os-auteurs)
Ici un aperçu du numéro: https://www.spirou.com/actualites/somma ... les-livres
En octobre est sorti l’album Les petits métiers méconnus “imaginés par Vincent Zabus, mis en images par » de nombreux dessinateurices, un(e) par histoire. Vincent Zabus expliquait (Spirou 4410) que des histoires courtes lui ont permis de travailler « avec des auteurs qui n’étaient pas disponibles pour un album entier », et c’est Alfred qui a réalisé l’histoire de cette semaine, qui a servi à compléter l’album. Sa couverture pour ce numéro de Spirou est tant romantique que romanesque, pour une des meilleures histoires de cette série née, expliquait Zabus, en 2022 du confinement dû au Covid : une libraire y est « vendeuse d’invendus », insérant à la sauvette des pages de ceux-ci dans des best-sellers, leur donnant une seconde chance inespérée. J’ajoute que travailler avec de multiples auteurices est un procédé qui sied bien au dramaturge et metteur en scène de théatre qu’est aussi Vincent Zabus, qui par ailleurs précisait (Spirou 4349) que sa première émotion en BD a été deux histoires de Spirou de Franquin, fondamentalement dissemblables et pourtant réunies dans le même album, Sur le ring « avec Poildur », et la teintée de racisme (plus exactement de paternalisme) mais foncièrement humaine Chez les pygmées, comme quoi les œuvres mêmes anecdotiques des grands auteurs offrent des ressources inépuisables. D'Alfred, je soulignerai sa façon d’utiliser la couleur comme dessin, qui lui permet entre autres de créer des liens inattendus, comme ici entre deux personnages dont le nez est fait d’un trait rouge, et me permet d’attirer l’attention sur la touchante note de bas de page de la seconde histoire courte du numéro, Plus blanc que blanc de Marc et Pep, de Nicoby, qui rend hommage à Philippe Oiry, son coloriste (et celui de Bouzard, Fabcaro, et bien d’autres, dont son propre fils Pierre Jeanneau pour Connexions, sélectionné à Angoulême), décédé en août dernier. Dans cette histoire des détectives privés, l’enquête n’apparait que dans la dernière page, et n’est de plus en plus dans cette série qu’un révélateur des relations entre les personnages et la société (Marc et Pep sont vus par un responsable de supermarché comme un « petit couple de mecs »). Tout le contraire, et ce serait a priori surprenant selon ce à quoi Dodier nous a habitué, du cinquième chapitre de Perpétuité, l'histoire en cours de JKJ Bloche, qui consiste en la recherche sur cinq pages quasi muettes d’un homme dans un immense maison quasi déserte, structure éminemment angoissante. Mais JKJ Bloche, comme toutes les bonnes séries noires, sait alterner et méler véritable récit et chronique sociale. Si Dodier peut se situer dans la tradition du polar, car ce genre se doit toujours de refléter la société, ce n’est pas le cas du récit d’aventure classique, qui ne marche plus que difficilement au premier degré, mais Fabcaro et Fabrice Erre dépassent dans Décalécatlàn par leur humour la trop souvent vue parodie de l’aventure exotique contaminée par la civilisation. Louca est toujours absent de ce troisième chapitre de La coupe du Griffon, où Bruno Dequier continue à présenter comment les autres personnages ont évolué durant ces années. Faire vieillir les personnages est en effet une des meilleures voies qu’ont trouvées les auteurs de séries d’aventures pour renouveler l’intérêt des lecteurices. La dernière histoire courte du numéro est un Capitaine Anchois où Floris réussit à fourrer dans trois pages piraterie, mythologie antique, arthurienne, et junk food, avec de plus un clin d’œil (volontaire, ou défaut de traduction?) aux jeux de rôle, la wyverne y apparaissant sous ce nom n’étant que le nom anglais ou des jeux de rôle HF de la vouivre.
Dans les gags, le Kid Paddle numéro 742 serait un gag de Game over ne serait l’apparition muette de Kid en dernière case, je me demande ce qui a décidé les auteurs Midam, Venet, Adam et Angèle à en faire un gag de Kid Paddle. Muet aussi le Crash Tex de Dab’s et Gom pour une version dégénérée de Guillaume Tell. Nena et Maria-Paz font une belle planche d’Otaku où les quatre strips sont en plan fixe pour faire ressortir le jeu de mise en page et le gag final, Zimra et Romain Pujol font une version accélérée du vieillissement des personnages dans Psychotine, quant à Ced, Frantz Hofmann et Annelise, ils font un gag de Kahl et Pörth entièrement basé sur le cadrage, réussi car la scène précédant la chute tient en elle-même par les dialogues et le dessin et ne fait pas artificiellement jouée ou étirée uniquement pour amener le gag. Toujours de bons conseils techniques dans La leçon de BD de Marko, amusante parodie de Lucky Luke chez Gary C. Neel de Gorobei et encore Ced, rappel nostalgique du libraire de Animal lecteur ! dans Le strip dont vous êtes la star de Libon et Sergio Salma, et suite de la série de Titan Inc. sur le cynisme rétrograde du capitaine, auquel Paul Martin et Manu Boisteau ajoutent cette semaine celui sardonique de Kata, la DRH. Humour noir dans Fish n chips de Tom, jeux de mots absurdes dans Des gens et inversement de Berth et dans Les Fifiches du Proprofesseur de Lécroart, celui-ci touchant juste sur un des plus importants débats de société actuels. Dans Dad flashbacks de Nob, Roxanne, à peine née, montre déjà sa personnalité ; paradoxe de la BD en magazine : cinq semaines d’attente est long pour qu’un personnage naisse enfin, mais est vraiment court pour une grossesse…Et on ne verra sans doute pas la maman de Bébérénice puisque la publicité pour l’album Dad flashbacks ne montre en couverture que les trois filles ainées. Autre publicité intéressante, pour La mémoire du futur, le Spirou et Fantasio de Schwartz, Abitan et Guerrive, avec Spirou et fantasio se reflétant dans un globe sur fond rouge, dessin bien plus réussi car à la fois plus révélateur et plus intrigant, y compris graphiquement avec ses ombres, que la couverture définitive fourre-tout (sauf Seccotine, pourtant autant si pas plus essentielle que Spirou et Fantasio).
Dans le rédactionnel, Fred Neidhart se révèle un scénariste très rigoureux dans Bienvenue dans mon atelier, à l’opposé de ce que pourrait laisser croire la réputation de fumiste qu’il joue à laisser trainer dans Spirou depuis quelques années, montre une relation forte avec Spirou, « dans l’ADN familial », en dépit de ses parodies et canulars d’apparence irrespectueuse, et annonce une nouvelle histoire des Tuniques bleues toujours avec Lambil. En direct du futur annonce la suite du Soda Résurrection, dix ans après la première partie, attente due au décès de Tome, toujours dessiné par Dan, et scénarisé pour la fin par deux scénaristes vedettes de Spirou période Tinlot, Zidrou et Falzar.
Enfin, L’édito des Fabrice et leur délire verbal, les Jeux de Lerouge, sur « la panique dans un magasin où la bande à Spirou (une multitude de personnages) veut trouver chaussure à son pied» tandis que l’inspecteur mène son enquête, et les témoignages de différents auteurs imaginant d’« inattendus gagne-pain » en marge des Petits métiers méconnus répondent tous à la fantaisie poétique qui baigne ce numéro : en dehors de Lucy Mazel, Carbone et Damien Cerq, qui imaginent des métiers impossibles dans l’esprit de la série, les autres auteurs, Libon, Alfred, Nob, Jousselin, ne font qu’exprimer ce qu’ils font dans leur vie quotidienne, et retranscrivent dans leurs BD (lire ici: https://www.spirou.com/bonus-de-la-reda ... os-auteurs)