Re: Cette semaine dans le journal de Spirou j'ai aimé...
Posté : sam. 18 mai 2024 20:08
Numéro 4489 du 24/04/2024
Ici un aperçu du magazine https://www.spirou.com/actualites/somma ... e-position
Retour, pour sa deuxième aventure dans Spirou, de Bertillon, le lieutenant aussi agaçant et tenace que Colombo. Ce sont deux héros qui n’en ont pas l’air, ainsi que le décrit le dessinateur Cyrille Pomès dans l’interview sur Spirou.com: “À travers cette attitude, c'est la dimension "anti-héros" de Bertillon qui s'exprime. Là où le héros traditionnel parvient seul à franchir les obstacles et sauve la demoiselle en détresse à la fin, notre lieutenant a suffisamment peu d'ego pour accepter de se laisser aider par d'autres, parfois plus qualifiés que lui parce que meilleurs connaisseurs de l'environnement de l'enquête. La force de Bertillon réside beaucoup dans son humilité.” Tout du moins, il écoute autrui quand ça lui est utile, car dans la vie quotidienne, il réagit souvent comme un gamin têtu. L’attrait de cette série se trouve pour moi dans l’expressionnisme joyeux du dessin et des couleurs (de Drac), ainsi que la magie sortie des croyances de populations différentes, forains et tsiganes dans la première histoire, peuples arctiques maintenant. La couverture, où ciel, mer et glace se mêlent illustre bien ce mélange des genres. Et, pour une fois, l’illustrateur des Jeux, Joann, a un dessin qui se rapproche quelque peu de celui de la BD qu’ils prennent pour thème: encrage épais, membres démesurés, trait alternant l’anguleux et l’arrondis.
Fin de l’histoire de Yoko Tsuno L’aigle des Highlands, étrange aventure où se mêlent monde extraterrestre et aventure terrestre, qui sont d’habitude disjoints, et où se sont retrouvés presque tous les nombreux personnages de la série, presque trop nombreux, d’autant que des nouveaux sont apparus, et que Leloup donne une personnalité à chacun, de micro conflits de caractères se superposant à une intrigue déjà assez complexe. Dans la grande tradition de la série d’aventure, Leloup conclue l’histoire en laissant des portes entrouvertes, préludes à de nouvelles aventures. Mais l’équilibre qu’il tenait entre série de SF dure et complexité des rapports humains se perd un peu, par accumulation de personnages, beaucoup donnant l’impression d’être trop grands et à l’étroit pour le petit rôle qui leur est dorénavant accordé, Vic, Pol et Khāny en premier. Et chaque personnage semble aussi porteur d’une histoire qui aurait pu être développée, mais est remise à plus tard, ou au contraire une resucée de personnages anciens, comme la Déesse, l’Élu suprême, ou les énigmatiques “Vinéens qui cachent une soif de pouvoir”. La série gagnerait à être ressérée et moins éparpillée entre les multiples personnages et leurs histoires juste abordées. Fin aussi de Secret Six, l’histoire de Black Squaw concluant visiblement un premier cycle, celle-ci devenant un agent fédéral, et la branche du KKK qui la pourchassait disparaissant par un coup du sort bienvenu, ainsi que son chef, dont le sourire permanent rappelle le Joker. Fin cynique à la Yann, une petite fille noire laissant périr le chef du KKK dans la même situation que celle où Bessie l’avait sauvé des années auparavant. Double combat final dans Rendez-vous avec le Bogeyman, dernière histoire de Créatures, l’un dans l’esprit matériel de Yog Sothoth, d’autre dans celui de Lovecraft, avec Minus, le petit garçon albinos qui s’exprime étonnamment bien pour son jeune âge. Une note en marge (un avantage d'un magazine sur un album) nous apprend que Djief, le dessinateur, a obtenu au Québec le Prix reconnaissance en bande dessinée, qui souligne son engagement pour la bande dessinée.
Deux histoires courtes dans ce numéro. L’une est une nouvelle enquête en huis-clos de Marc et Pep, d’autant plus clos que Marc a un torticolis le contraignant à passer l’enquête dans un fauteuil, celle-ci se déroulant dans une seul pièce, et de nouveau Philippe Ory et Nicoby donnent un titre en fausse piste lié en jeu de mots à un minuscule détail de l’histoire. L’autre est dans le strip-book en Supplément, un nouvel épisode de Grands Panards, ce grand gars hirsute de Colin Atthard, à la recherche des siens, qui va tenter cette fois de répondre à l’invitation de son cousin Yéti à venir prendre le thé. Et le Bulletin d’abonnement de Cromheecke et Thiriet, coïncidence encore?, met en scène un crime absolument semblable à celui de Marc et Pep.
Dans les gags, le Gaston de Delaf débute dans la joie: Prunelle et Fantasio, bourrés comme le reste de la rédaction (hormis Boulier, qui ne le sera qu’en fin de page), copains comme cochons, s’enlaçant, entrent dans un bureau, Fantasio s’écriant “Prunelle et moi sommes officiellement virés!”, et Prunelle enchaîne, les yeux baignés de larmes de joie, “Je vais pouvoir enfin me casser d’ici!!…” C’est un peu comme si des repreneurs des Tuniques bleues montraient Chesterfield, Stark, Alexander, et même Grant ou Lincoln ne pensant, comme Blutch, qu’à déserter…Ou faisaient de Boule, ou d’un Spirou enfant, des obsédés sexuels. Cela dit, puisque commercialement ça marche, pourquoi se gêner…? Par une heureuse coïncidence de mise en page (ou serait-ce magnifiquement calculé?) en vis-à-vis de Gaston, L’Édito montre les Fabrice cherchant eux aussi à partir du journal, mais ce n’est que la suite de leur lamentable stratagème de la semaine précédente pour se faire augmenter. Le fils de Brad Rock, le chercheur d’or reconverti dans le maraichage, devient militant exalté pour la protection des animaux sous la plume de Jilème et le pinceau de Sophie David. L’histoire courte la semaine précédente d’Annabelle, pirate rebelle, par Sti, Cédric Ghorbani et Cerise, n’était qu’une fausse piste de présentation, puisque c’est finalement une nouvelle série de gags en une page (une de plus). L’équipage de Capitaine Anchois de Floris s’affole devant ce qu’ils croient être des zombies. Midam a bien profité de son séjour à Hong Kong, puisque les lettres qu’il invente (avec Dairin) pour le langage du “Blork zabrakien du sud-est parlant tellarite avec des suffixes dérivationnels” s’inspire des caractères chinois, c’est graphiquement réussi. Enfin, le manque de confiance en soi de Elliot, au collège comme ailleurs, lui fait causer une pathétique prophétie auto-réalisatrice.
Dans le rédactionnel, Bienvenue dans la bibliothèque de Véro Gally, dessinatrice entre autres d’amusantes histoires courtes scénarisées par Véro Cazot dans Spirou, a lu de tout, de Mafalda aux comics underground, une bonne quinzaine de BD par semaine quand elle était libraire, et En direct du futur annonce le retour de Léon et Lena, absents depuis septembre 2023, en juin. Dans une pub pour la série pour enfants Petit poilu, de Bailly et Fraipont, est écrit “Des histoires sans mot à lire tout seul ou bien en famille”, confirmant qu’à l’instar d’un plan ou d’une horloge, une bande dessinée, même muette, se lit au même titre qu’une parlante.
Ici un aperçu du magazine https://www.spirou.com/actualites/somma ... e-position
Retour, pour sa deuxième aventure dans Spirou, de Bertillon, le lieutenant aussi agaçant et tenace que Colombo. Ce sont deux héros qui n’en ont pas l’air, ainsi que le décrit le dessinateur Cyrille Pomès dans l’interview sur Spirou.com: “À travers cette attitude, c'est la dimension "anti-héros" de Bertillon qui s'exprime. Là où le héros traditionnel parvient seul à franchir les obstacles et sauve la demoiselle en détresse à la fin, notre lieutenant a suffisamment peu d'ego pour accepter de se laisser aider par d'autres, parfois plus qualifiés que lui parce que meilleurs connaisseurs de l'environnement de l'enquête. La force de Bertillon réside beaucoup dans son humilité.” Tout du moins, il écoute autrui quand ça lui est utile, car dans la vie quotidienne, il réagit souvent comme un gamin têtu. L’attrait de cette série se trouve pour moi dans l’expressionnisme joyeux du dessin et des couleurs (de Drac), ainsi que la magie sortie des croyances de populations différentes, forains et tsiganes dans la première histoire, peuples arctiques maintenant. La couverture, où ciel, mer et glace se mêlent illustre bien ce mélange des genres. Et, pour une fois, l’illustrateur des Jeux, Joann, a un dessin qui se rapproche quelque peu de celui de la BD qu’ils prennent pour thème: encrage épais, membres démesurés, trait alternant l’anguleux et l’arrondis.
Fin de l’histoire de Yoko Tsuno L’aigle des Highlands, étrange aventure où se mêlent monde extraterrestre et aventure terrestre, qui sont d’habitude disjoints, et où se sont retrouvés presque tous les nombreux personnages de la série, presque trop nombreux, d’autant que des nouveaux sont apparus, et que Leloup donne une personnalité à chacun, de micro conflits de caractères se superposant à une intrigue déjà assez complexe. Dans la grande tradition de la série d’aventure, Leloup conclue l’histoire en laissant des portes entrouvertes, préludes à de nouvelles aventures. Mais l’équilibre qu’il tenait entre série de SF dure et complexité des rapports humains se perd un peu, par accumulation de personnages, beaucoup donnant l’impression d’être trop grands et à l’étroit pour le petit rôle qui leur est dorénavant accordé, Vic, Pol et Khāny en premier. Et chaque personnage semble aussi porteur d’une histoire qui aurait pu être développée, mais est remise à plus tard, ou au contraire une resucée de personnages anciens, comme la Déesse, l’Élu suprême, ou les énigmatiques “Vinéens qui cachent une soif de pouvoir”. La série gagnerait à être ressérée et moins éparpillée entre les multiples personnages et leurs histoires juste abordées. Fin aussi de Secret Six, l’histoire de Black Squaw concluant visiblement un premier cycle, celle-ci devenant un agent fédéral, et la branche du KKK qui la pourchassait disparaissant par un coup du sort bienvenu, ainsi que son chef, dont le sourire permanent rappelle le Joker. Fin cynique à la Yann, une petite fille noire laissant périr le chef du KKK dans la même situation que celle où Bessie l’avait sauvé des années auparavant. Double combat final dans Rendez-vous avec le Bogeyman, dernière histoire de Créatures, l’un dans l’esprit matériel de Yog Sothoth, d’autre dans celui de Lovecraft, avec Minus, le petit garçon albinos qui s’exprime étonnamment bien pour son jeune âge. Une note en marge (un avantage d'un magazine sur un album) nous apprend que Djief, le dessinateur, a obtenu au Québec le Prix reconnaissance en bande dessinée, qui souligne son engagement pour la bande dessinée.
Deux histoires courtes dans ce numéro. L’une est une nouvelle enquête en huis-clos de Marc et Pep, d’autant plus clos que Marc a un torticolis le contraignant à passer l’enquête dans un fauteuil, celle-ci se déroulant dans une seul pièce, et de nouveau Philippe Ory et Nicoby donnent un titre en fausse piste lié en jeu de mots à un minuscule détail de l’histoire. L’autre est dans le strip-book en Supplément, un nouvel épisode de Grands Panards, ce grand gars hirsute de Colin Atthard, à la recherche des siens, qui va tenter cette fois de répondre à l’invitation de son cousin Yéti à venir prendre le thé. Et le Bulletin d’abonnement de Cromheecke et Thiriet, coïncidence encore?, met en scène un crime absolument semblable à celui de Marc et Pep.
Dans les gags, le Gaston de Delaf débute dans la joie: Prunelle et Fantasio, bourrés comme le reste de la rédaction (hormis Boulier, qui ne le sera qu’en fin de page), copains comme cochons, s’enlaçant, entrent dans un bureau, Fantasio s’écriant “Prunelle et moi sommes officiellement virés!”, et Prunelle enchaîne, les yeux baignés de larmes de joie, “Je vais pouvoir enfin me casser d’ici!!…” C’est un peu comme si des repreneurs des Tuniques bleues montraient Chesterfield, Stark, Alexander, et même Grant ou Lincoln ne pensant, comme Blutch, qu’à déserter…Ou faisaient de Boule, ou d’un Spirou enfant, des obsédés sexuels. Cela dit, puisque commercialement ça marche, pourquoi se gêner…? Par une heureuse coïncidence de mise en page (ou serait-ce magnifiquement calculé?) en vis-à-vis de Gaston, L’Édito montre les Fabrice cherchant eux aussi à partir du journal, mais ce n’est que la suite de leur lamentable stratagème de la semaine précédente pour se faire augmenter. Le fils de Brad Rock, le chercheur d’or reconverti dans le maraichage, devient militant exalté pour la protection des animaux sous la plume de Jilème et le pinceau de Sophie David. L’histoire courte la semaine précédente d’Annabelle, pirate rebelle, par Sti, Cédric Ghorbani et Cerise, n’était qu’une fausse piste de présentation, puisque c’est finalement une nouvelle série de gags en une page (une de plus). L’équipage de Capitaine Anchois de Floris s’affole devant ce qu’ils croient être des zombies. Midam a bien profité de son séjour à Hong Kong, puisque les lettres qu’il invente (avec Dairin) pour le langage du “Blork zabrakien du sud-est parlant tellarite avec des suffixes dérivationnels” s’inspire des caractères chinois, c’est graphiquement réussi. Enfin, le manque de confiance en soi de Elliot, au collège comme ailleurs, lui fait causer une pathétique prophétie auto-réalisatrice.
Dans le rédactionnel, Bienvenue dans la bibliothèque de Véro Gally, dessinatrice entre autres d’amusantes histoires courtes scénarisées par Véro Cazot dans Spirou, a lu de tout, de Mafalda aux comics underground, une bonne quinzaine de BD par semaine quand elle était libraire, et En direct du futur annonce le retour de Léon et Lena, absents depuis septembre 2023, en juin. Dans une pub pour la série pour enfants Petit poilu, de Bailly et Fraipont, est écrit “Des histoires sans mot à lire tout seul ou bien en famille”, confirmant qu’à l’instar d’un plan ou d’une horloge, une bande dessinée, même muette, se lit au même titre qu’une parlante.