Re: Cette semaine dans le journal de Spirou j'ai aimé...
Posté : sam. 11 mai 2024 21:18
Numéro 4487 du 10/04/2024
Ici un aperçu du magazine https://www.spirou.com/actualites/somma ... -clairiere
Couverture et histoire courte de La clairière s’amuse. Le dessin en faux croquis, faussement simplet, très expressif et rendant bien les tronches d’ahuris© de Thomas Priou porte très bien ces historiettes animalières d’humour cruel, contrepoint désillusionné à Sylvain et Sylvette (l’ours, le loup et le renard sont trois des quatre compères), où les animaux ne sont pas soumis aux humains mais en reprennent tous les travers. Cela fonctionne bien mieux pour moi que dans Léon et Léna, l’autre série scénarisée par Damien Cerq dans Spirou, où la cruauté fait forcée, systématique. Puisque la série est mise à l’honneur, on a de nouveau droit à une de ces interviews où les auteurs expliquent ce qu’ils ont voulu faire, ce qui est par essence absurde, car si une œuvre a besoin d’être expliquée pour être appréciée, c’est qu’elle est ratée (ce qui n’est pas le cas ici). Et l’absurdité du principe amène immanquablement des conséquences absurdes, comme ici lorsque Damien Cerq explique qu’”il faut arrêter de mentir aux enfants: les animaux sont cruels entre eux”, pour être amené à dire paragraphe suivant que le sujet de La clairière s’amuse est “une critique de notre société”. Faudrait savoir, description de la cruauté animale, ou de la cruauté humaine? Et je ne parle pas de la remarque selon laquelle “les animaux se font la guerre pour des histoires de territoire”, qui point de vue éthologique est aussi dénué de sens que de proclamer que les lapins sont gentils et les loups méchants…Il n’est que de lire, dans les ouvrages récents, Habiter en oiseau, de Vinciane Despret, (2019, chez Actes Sud) pour voir l’inanité de ce discours. Il y a toutefois des passages intéressants dans ces interviews, quand les auteurs parlent de leur œuvre, et non du sens à donner à celle-ci (en admettant qu’il faille être pédagogique, il y a des moyens plus amusants et efficaces). Ainsi, ici, https://www.spirou.com/bonus-de-la-reda ... -tabassent , quand Thomas Priou confirme d’où vient la vivacité de son dessin: “Je commence par crayonner toutes mes pages d'un coup, puis je passe le plus vite possible à l'encrage afin de garder l'émulation. L'encrage est vraiment mon étape préférée, celle où j'essaie de lâcher mon trait tout en faisant en sorte qu'il soit élégant et colle au mieux à l'histoire.
Au départ, la tablette m'a tendu des pièges. Je voulais toujours corriger des détails... Avec l'expérience, je vois bien que ça ne sert à rien. Mon truc, maintenant, c'est de regarder mes planches lorsqu'elles sont publiées dans SPIROU. Je constate ce qui marche, ce qui ne marche pas, et je m'en sers pour les planches suivantes.”
Cela corrobore d’une part le fait que, pour la BD (en dehors des BD en couleurs directes), les bons dessinateurs sont de bons encreurs, et ceux pour qui l’encrage est une étape obligée sans intérêt, ou considèrent qu’il fait perdre la vitalité du crayonné, ont des problèmes avec le dessin de BD. Ainsi, Bédu dans Bienvenue dans mon atelier dit que “l’encrage est moins amusant parce que mon crayonné est très poussé”, ce qui explique en partie la raideur des personnages humains. D’autre part, cela confirme aussi qu’en BD, l’œuvre est la page imprimée, reproduite, et pas la planche originale, comme en musique l’œuvre est ce qu’on entend, pas le CD ou la partition, comme au cinéma le montage final et pas l’intégralité de ce qui a été filmé.
D’autres histoires courtes dans le supplément, un livret publié à l’occasion du Festival du Livre de Paris, dont le Québec est cette année l’invité d’honneur, intitulé “Destination Québec. Sept conseils essentiels pour réussir votre séjour. “ À la différence du précédent guide Spirou sur le Québec, paru en 2015 (numéro 4042), avec, non seulement Delaf et autre Djieff, mais aussi Jimmy Beaulieu, Jean-Paul Eid, Réal Godbout, Julie Rocheleau et bien d’autres, celui-ci ne contient que des auteurs Spirou, québécois ou en lien avec le Québec, hormis Jacques Lamontagne, qui signe Lam la couverture. Amusante histoire de Djieff, d’où il ressort qu’un voyage au Québec n’est agréable pratiquement que quelques jours en septembre, toute autre saison ayant ses calamités. (Soit dit en passant: Joe Dassin n’a pas fait d’appropriation culturelle en parlant d’”été des indiens”, et il n’est pas étonnant que ce “terme ne soit employé par aucune communauté autochtone”, puisqu’il a chanté L’été indien, et donc, pas “des indiens”). Philippe Girard, qui avait publié Béatrice dans Spirou entre 2006 et 2008 sous le pseudonyme de Phlppgrrd (une inspiration de Frnck?), parle du “Climat…encore” (avec un invité ressemblant beaucoup à Trondheim ), et du rock québécois avec les Cow-boys fringants. Pascal Colpron explique “comment survivre à la poutine”, “un mélange absolument décadent”, ce qui ne m’étonne pas, puisque dans Paul à Québec, de Pascal Rabagliatti, j’ai appris qu’à Québec (la ville, pas la province), on terminait ses croutes de pizza avec du beurre…Clara Cuadrado fait part de son expérience de vie au Québec, pas d’un guide touristique comme les autres auteurs, par contre, Benoît Ferroumont fait son “asti d’touriste” en sortant se promener inconsciemment pendant une tempête de neige, séquence intitulée “Le climat…toujours”.
Dans les gags, Gaston avec un Prunelle alcoolique pathétique. En passant, Franquin avait l’habitude de dessiner sur les murs de la rédac de Gaston des affiches fictives de personnages qu’il aimait bien, de Spirou ou d’ailleurs, du Flagada à Philémon et du Reiser, ouvrant ainsi les lecteurs à d’autres univers. Delaf, copiste intégriste, reprend cette idée de façon étriquée en n’y mettant que des personnages de Franquin, comme cette semaine Zorglub. On sent le vécu par contre dans la manière dont les Fabrice agitent des peluches en les faisant parler pour leur BD animalière dans L’édito. J’apprends dans 3 infos, 2 vraies 1 fausse par Bernstein, Bercovici et Robin Le Gall que l’on pouvait terminer Tetris (je ne m’étais jamais posé la question, à vrai dire). Willy Woob de Bernstein et Moog construit une cabane en bois, mais loin de l’ancestrale log cabin canadienne, en fait un resort de luxe, avec greenwashing de rigueur.
Avec une page de Kid Paddle, une de Game over, une page de pub pour un album anthologie (ou florilège, ou best of comme écrit) de Kid Paddle, et une autre pour un livre d’entretiens avec Thierry Tinlot et un autre pour apprendre les bases des maths avec Kid Paddle, pour les 30 ans du personnage, Midam est aussi à l’honneur de ce numéro.
Dans Yoko Tsuno, Leloup continue à recycler scènes (vaisseau attiré dans une grotte immense par un puissance mystérieuse) et dialogues (“-Vous vous moquez de moi, Yoko! -Une manière d’atténuer mes craintes…pardon, Khany!”) dans ce que j’ai du mal à considérer comme une anthologie. Dans Black Squaw, Yann et Henriet illustrent une incompréhensible apparition de Laurel et Hardy comme membres du Ku-Klux-Klan. Séquence d’action fantastique dans Créatures, avec la grande créature que les personnages appellent familièrement Yog. Émotion et humour encore dans Frnck, dans une séquence toujours réjouissante où des personnages débarquent dans une autre époque et y perçoivent tout de façon décalée; un tricératops balance une 2CV au bas d’une falaise, et sa propriétaire commente “Maintenant, elle va marcher beaucoup moins bien, forcément.” Qui sait d’où vient cette citation?
Enfin, dans les rubriques, Marko dans La leçon de BD donne des conseils utiles (les accessoires pour identifier un personnage, le test de dessiner un personnage uniquement en ombre pour se rendre compte si son attitude est immédiatement compréhensible) mais sans préciser qu’ils sont normatifs (pourquoi une collégienne porterait-elle le même accessoire, un foulard, en 6ème et en 2nde? Le test des ombres conduit à outrer toutes les attitudes). Bédu, dans son Atelier, dit qu'il repreesentait parfois dans ses planches des Psy des objets de son atelier, manière sympathique de s'investir, comme Franquin avec ses affiches sur les murs de la rédac.Une impressionnante double page de Jeux de Jacques Lerouge, où des queues de marsupilamis s’entremèlent avec les tentacules d’un poulpe géant. Et En direct du futur annonce l’ouverture du Parc Spirou pour sa septième saison, ainsi que le Festival Spirou qui s’y tiendra fin mai.
Ici un aperçu du magazine https://www.spirou.com/actualites/somma ... -clairiere
Couverture et histoire courte de La clairière s’amuse. Le dessin en faux croquis, faussement simplet, très expressif et rendant bien les tronches d’ahuris© de Thomas Priou porte très bien ces historiettes animalières d’humour cruel, contrepoint désillusionné à Sylvain et Sylvette (l’ours, le loup et le renard sont trois des quatre compères), où les animaux ne sont pas soumis aux humains mais en reprennent tous les travers. Cela fonctionne bien mieux pour moi que dans Léon et Léna, l’autre série scénarisée par Damien Cerq dans Spirou, où la cruauté fait forcée, systématique. Puisque la série est mise à l’honneur, on a de nouveau droit à une de ces interviews où les auteurs expliquent ce qu’ils ont voulu faire, ce qui est par essence absurde, car si une œuvre a besoin d’être expliquée pour être appréciée, c’est qu’elle est ratée (ce qui n’est pas le cas ici). Et l’absurdité du principe amène immanquablement des conséquences absurdes, comme ici lorsque Damien Cerq explique qu’”il faut arrêter de mentir aux enfants: les animaux sont cruels entre eux”, pour être amené à dire paragraphe suivant que le sujet de La clairière s’amuse est “une critique de notre société”. Faudrait savoir, description de la cruauté animale, ou de la cruauté humaine? Et je ne parle pas de la remarque selon laquelle “les animaux se font la guerre pour des histoires de territoire”, qui point de vue éthologique est aussi dénué de sens que de proclamer que les lapins sont gentils et les loups méchants…Il n’est que de lire, dans les ouvrages récents, Habiter en oiseau, de Vinciane Despret, (2019, chez Actes Sud) pour voir l’inanité de ce discours. Il y a toutefois des passages intéressants dans ces interviews, quand les auteurs parlent de leur œuvre, et non du sens à donner à celle-ci (en admettant qu’il faille être pédagogique, il y a des moyens plus amusants et efficaces). Ainsi, ici, https://www.spirou.com/bonus-de-la-reda ... -tabassent , quand Thomas Priou confirme d’où vient la vivacité de son dessin: “Je commence par crayonner toutes mes pages d'un coup, puis je passe le plus vite possible à l'encrage afin de garder l'émulation. L'encrage est vraiment mon étape préférée, celle où j'essaie de lâcher mon trait tout en faisant en sorte qu'il soit élégant et colle au mieux à l'histoire.
Au départ, la tablette m'a tendu des pièges. Je voulais toujours corriger des détails... Avec l'expérience, je vois bien que ça ne sert à rien. Mon truc, maintenant, c'est de regarder mes planches lorsqu'elles sont publiées dans SPIROU. Je constate ce qui marche, ce qui ne marche pas, et je m'en sers pour les planches suivantes.”
Cela corrobore d’une part le fait que, pour la BD (en dehors des BD en couleurs directes), les bons dessinateurs sont de bons encreurs, et ceux pour qui l’encrage est une étape obligée sans intérêt, ou considèrent qu’il fait perdre la vitalité du crayonné, ont des problèmes avec le dessin de BD. Ainsi, Bédu dans Bienvenue dans mon atelier dit que “l’encrage est moins amusant parce que mon crayonné est très poussé”, ce qui explique en partie la raideur des personnages humains. D’autre part, cela confirme aussi qu’en BD, l’œuvre est la page imprimée, reproduite, et pas la planche originale, comme en musique l’œuvre est ce qu’on entend, pas le CD ou la partition, comme au cinéma le montage final et pas l’intégralité de ce qui a été filmé.
D’autres histoires courtes dans le supplément, un livret publié à l’occasion du Festival du Livre de Paris, dont le Québec est cette année l’invité d’honneur, intitulé “Destination Québec. Sept conseils essentiels pour réussir votre séjour. “ À la différence du précédent guide Spirou sur le Québec, paru en 2015 (numéro 4042), avec, non seulement Delaf et autre Djieff, mais aussi Jimmy Beaulieu, Jean-Paul Eid, Réal Godbout, Julie Rocheleau et bien d’autres, celui-ci ne contient que des auteurs Spirou, québécois ou en lien avec le Québec, hormis Jacques Lamontagne, qui signe Lam la couverture. Amusante histoire de Djieff, d’où il ressort qu’un voyage au Québec n’est agréable pratiquement que quelques jours en septembre, toute autre saison ayant ses calamités. (Soit dit en passant: Joe Dassin n’a pas fait d’appropriation culturelle en parlant d’”été des indiens”, et il n’est pas étonnant que ce “terme ne soit employé par aucune communauté autochtone”, puisqu’il a chanté L’été indien, et donc, pas “des indiens”). Philippe Girard, qui avait publié Béatrice dans Spirou entre 2006 et 2008 sous le pseudonyme de Phlppgrrd (une inspiration de Frnck?), parle du “Climat…encore” (avec un invité ressemblant beaucoup à Trondheim ), et du rock québécois avec les Cow-boys fringants. Pascal Colpron explique “comment survivre à la poutine”, “un mélange absolument décadent”, ce qui ne m’étonne pas, puisque dans Paul à Québec, de Pascal Rabagliatti, j’ai appris qu’à Québec (la ville, pas la province), on terminait ses croutes de pizza avec du beurre…Clara Cuadrado fait part de son expérience de vie au Québec, pas d’un guide touristique comme les autres auteurs, par contre, Benoît Ferroumont fait son “asti d’touriste” en sortant se promener inconsciemment pendant une tempête de neige, séquence intitulée “Le climat…toujours”.
Dans les gags, Gaston avec un Prunelle alcoolique pathétique. En passant, Franquin avait l’habitude de dessiner sur les murs de la rédac de Gaston des affiches fictives de personnages qu’il aimait bien, de Spirou ou d’ailleurs, du Flagada à Philémon et du Reiser, ouvrant ainsi les lecteurs à d’autres univers. Delaf, copiste intégriste, reprend cette idée de façon étriquée en n’y mettant que des personnages de Franquin, comme cette semaine Zorglub. On sent le vécu par contre dans la manière dont les Fabrice agitent des peluches en les faisant parler pour leur BD animalière dans L’édito. J’apprends dans 3 infos, 2 vraies 1 fausse par Bernstein, Bercovici et Robin Le Gall que l’on pouvait terminer Tetris (je ne m’étais jamais posé la question, à vrai dire). Willy Woob de Bernstein et Moog construit une cabane en bois, mais loin de l’ancestrale log cabin canadienne, en fait un resort de luxe, avec greenwashing de rigueur.
Avec une page de Kid Paddle, une de Game over, une page de pub pour un album anthologie (ou florilège, ou best of comme écrit) de Kid Paddle, et une autre pour un livre d’entretiens avec Thierry Tinlot et un autre pour apprendre les bases des maths avec Kid Paddle, pour les 30 ans du personnage, Midam est aussi à l’honneur de ce numéro.
Dans Yoko Tsuno, Leloup continue à recycler scènes (vaisseau attiré dans une grotte immense par un puissance mystérieuse) et dialogues (“-Vous vous moquez de moi, Yoko! -Une manière d’atténuer mes craintes…pardon, Khany!”) dans ce que j’ai du mal à considérer comme une anthologie. Dans Black Squaw, Yann et Henriet illustrent une incompréhensible apparition de Laurel et Hardy comme membres du Ku-Klux-Klan. Séquence d’action fantastique dans Créatures, avec la grande créature que les personnages appellent familièrement Yog. Émotion et humour encore dans Frnck, dans une séquence toujours réjouissante où des personnages débarquent dans une autre époque et y perçoivent tout de façon décalée; un tricératops balance une 2CV au bas d’une falaise, et sa propriétaire commente “Maintenant, elle va marcher beaucoup moins bien, forcément.” Qui sait d’où vient cette citation?
Enfin, dans les rubriques, Marko dans La leçon de BD donne des conseils utiles (les accessoires pour identifier un personnage, le test de dessiner un personnage uniquement en ombre pour se rendre compte si son attitude est immédiatement compréhensible) mais sans préciser qu’ils sont normatifs (pourquoi une collégienne porterait-elle le même accessoire, un foulard, en 6ème et en 2nde? Le test des ombres conduit à outrer toutes les attitudes). Bédu, dans son Atelier, dit qu'il repreesentait parfois dans ses planches des Psy des objets de son atelier, manière sympathique de s'investir, comme Franquin avec ses affiches sur les murs de la rédac.Une impressionnante double page de Jeux de Jacques Lerouge, où des queues de marsupilamis s’entremèlent avec les tentacules d’un poulpe géant. Et En direct du futur annonce l’ouverture du Parc Spirou pour sa septième saison, ainsi que le Festival Spirou qui s’y tiendra fin mai.