LES VOLEURS DU MARSUPILAMI

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Pigling-Bland
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LES VOLEURS DU MARSUPILAMI

Message par Pigling-Bland »

LES VOLEURS DU MARSUPILAMI par André Franquin d'après une idée de Jo Almo.
Editions Dupuis


Voici la couverture de l'édition originale belge de cet album publié en 1954
(la version originale française est avec un dos carré papier orange) :

Image

Image

Si vous l'avez déjà lu vous pouvez le noter selon le barème suivant :

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Prunelle
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Re: LES VOLEURS DU MARSUPILAMI

Message par Prunelle »

Album génial : 5
Superbe couverture.
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DESPERA
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Re: LES VOLEURS DU MARSUPILAMI

Message par DESPERA »

De la grande aventure. J'adore le côté énigme et enquête policère.
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Parker
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Re: LES VOLEURS DU MARSUPILAMI

Message par Parker »

La grande classe déjà: poursuite dans le zoo (avec le gardien + le varan), Valentin Mollet et la scene du football super bien évoqué, le cirque Zabaglione et ses personnages, le numéro de S&F avec l'aide des pilules du Comte ... que de trouvailles dans cet album bien maitrisé.
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Re: LES VOLEURS DU MARSUPILAMI

Message par ElEmperador1907 »

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Re: LES VOLEURS DU MARSUPILAMI

Message par Gaston Lagaffe »

Un récit sympathique avec des moments forts comme la poursuite au Zoo.
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Mister B
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Re: LES VOLEURS DU MARSUPILAMI

Message par Mister B »

Du très bon Franquin riche en gag et en action
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Moulignac
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Re: LES VOLEURS DU MARSUPILAMI

Message par Moulignac »

Dessins magnifiques, intrigue prenante, construction des planches très dynamique avec courses poursuites, bagarres acharnées mais jamais bien méchantes (Spirou qui se prend une grosse fessée par un douanier :spirou: ).
Et puis l'esprit des années 50 parfaitement traduit avec ses voitures à carrosserie travailées , ses vêtements très sobres, l'attitude des personnages, le mobilier urbain ...
Très bon album, je mets 4.
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Phileas
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Re: LES VOLEURS DU MARSUPILAMI

Message par Phileas »

Un 5.

Un album qui m'a toujours charmé par son atmosphère pleine de mystères (celle du zoo notamment) et qui propose une intrigue plus solidement charpentée que les deux précédents (j'y vois l'influence du roman policier).
Avec La mauvaise tête, c'est l'album de cette époque qui restitue le mieux cette ambiance particulière très "franquinienne" de l'aventure urbaine que j'essaie toujours d'expliquer à ceux qui ne connaissent pas (ou mal) le travail de l'auteur à cette époque.
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Fantasio magazine
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Re: LES VOLEURS DU MARSUPILAMI

Message par Fantasio magazine »

J'ai mis 5. J'aime beaucoup cet album. Enfin une histoire qu se tient comme un tout du début à la fin. J'aime les poursuites a zoo, surtout avec le côté humour du gardien qui leur nuit sans arrêt. La malchance qu s'acharnent sur nos héros est assez divertissante. Beaucoup de rythme, pour moi, cet album surpasse son prédecesseur.
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Jalias
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Re: LES VOLEURS DU MARSUPILAMI

Message par Jalias »

Vous ne vous êtes pas fait trop mal ? Je suis désolé, je n’avais pas le choix ! Euh… adieu !

Lorsqu’on voit le classement des inédispiroutistes, on a l’impression que les Voleurs de Marsupilami, suite à Spirou et les Héritiers, a moins marqué les lecteurs que ses deux prédécesseurs (Il y a un Sorcier à Champignac et Spirou et les Héritiers donc). Après l’importance des deux premières histoires longues signées Franquin sur l’univers du groom, est-ce que celle-ci serait plus mineure, comme si Franquin trouvait un rythme de croisière pour la série ? Ou à l’inverse, les Voleurs de Marsupilami profitent-ils de l’expérience acquise par Franquin pour proposer une aventure plus aboutie ? Etudions donc la forme et le fond de cette troisième aventure longue du jeune dessinateur.

La forme : expérimentations graphiques et structurelles.

Il est intéressant de noter que si Les Voleurs de Marsupilami s’inscrivent narrativement directement à la suite de Spirou et les Héritiers, l’intrigue reprenant exactement sur l’interrogation soulevée en fin d’album précédent et faisant donc de ces deux albums le premier diptyque officiel de la série (mais Radar le Robot et les Plans du Robot sont déjà passés par là); on peut également le voir comme le dernier album d’une trilogie formelle entamée avec Il y a un Sorcier à Champignac et centrée sur la mise en place d’un univers concret et stable autour de nos héros, en opposition à l’univers « changeant », « fluctuant » des périodes Rob-Vel et Jijé, où à part les héros, aucun repère fixe ou personnage secondaire ne s’est vraiment dégagé très longtemps.

Ainsi si Il y a un Sorcier à Champignac proposait la première histoire longue de Franquin (en album, l’auteur a tout de même à son actif les histoires semi-longues de l’Héritage et Radar le Robot et sa suite), elle n’en était pas tout à fait une, l’intrigue étant maladroitement relancée aux deux-tiers de l’album. Spirou et les Héritiers quant à lui présentait bien trois intrigues liées les unes aux autres grâce aux épreuves de l’oncle Tanzafio. Procédé plutôt astucieux mais tout de même assez visible et qui peut donc atteindre rapidement ses limites. Pour les Voleurs de Marsupilami, Franquin semble prendre le meilleur de ses deux précédentes tentatives. Il propose un récit beaucoup plus cohérent, centré comme pour Champignac sur un concept fort, le vol et la recherche du Marsupilami, qui soutient tout l’album, tout en gardant de Spirou et les Héritiers (et de l’Héritage avant lui) l’idée de changement d’ambiance, changement d’atmosphère et de dépaysement. Pour ce faire, et éviter les soucis structurels qu’il a pu rencontrer dans Il y a un Sorcier à Champignac, l’auteur déplace continuellement son action (qui passe du jardin zoologique jusqu’à Magnana, son stade et son cirque), rendant l’univers plus grand, plus large et plus tangible au passage.

Ce faisant, il s’appuie également sur l’aspect feuilletonnant de son format et l’explore d’une nouvelle façon. Après la page comme unité narrative chez Rob-Vel, Jijé puis Franquin ont progressivement imposé l’histoire (voire l’album) comme unité narrative, et les artificiels suspenses de bas de page deviennent des retournements de situation plus naturels dans l’intrigue. Mais ici, les Voleurs de Marsupilami sont étroitement liés à son prédécesseur, ne serait-ce que parce que l’intrigue ne pourrait pas avoir lieu sans les événements de Spirou et les Héritiers ; développant ainsi une continuité et une chronologie à la série. Le clou est enfoncé par l’apparition du Comte de Champignac au détour d’une case, comme outil narratif pour faire avancer l’intrigue. Avec cette seconde apparition dans la série, le Comte devient une figure récurrente de l’univers du groom, concept qui n’avait plus vraiment été utilisé depuis les tout débuts de Spirou au Moustic Hotel, où l’univers étroit du groom se confrontait à Entresol et Verdegris. Qui plus est, les retrouvailles de Spirou, Fantasio et le Comte – un heureux hasard un peu artificiel – participent à la construction d’un univers paradoxalement plus réaliste, où les personnages secondaires vivent leur vie « hors album », et n’attendent pas juste « d’être sonnés » par le héros. Ce même procédé avait été utilisé plus tôt lorsque Valentine Mollet bouscule par hasard Spirou. L’arrivée de ce personnage à ce moment de l’intrigue est tout à fait inattendue, et l’artificialité de cet « heureux hasard » est immédiatement compensée par l’aspect logique de la situation (Mme Mollet a retrouvé son mari à Magnana).

On notera d’ailleurs que la chance et surtout son pendant la malchance est l’outil narratif le plus utilisé dans cet album. Nos héros arrivent constamment une minute trop tard, à cause d’embuches et surtout de figurants qui ne font que les gêner : le gardien de nuit, les policiers, les douaniers, le nain et le géant… la liste de ces personnages qui gravitent autour de l’intrigue, sans y être pleinement liés, est longue. Et les guignes (l’échelle brisée, la panne d’essence, la grève des douaniers etc) s’enchaînent. Le but avoué est de permettre de rallonger l’intrigue tout en proposant des situations toutes plus incongrues les unes que les autres ; mais ça participe également à la création de cet univers qui dépasse l’intrigue, où chaque personnage à ses propres motivations, qui parfois rentrent en contradiction avec celles de nos héros. Ces « nuisibles », souvent hilarants mais toujours justes dans leur caractérisation, restent une des marques de fabrique de Franquin et de son œuvre. La méthode peut cela dit imposer une certaine artificialité à l’histoire, constamment « parasitée » par ces éléments extérieurs. Ce n’est heureusement pas le cas, grâce comme je l’ai dit à l’aspect crédible de l’univers ainsi brossé (bah oui, pourquoi les policiers les croiraient ? Et c’est exactement ainsi que des douaniers en grève se comporteraient !), mais également grâce à l’humour de ces situations toujours plus absurdes. Mention au gag de répétition de Spirou et Fantasio qui cherchent à s’infiltrer au cirque, et bien sûr à l’hilarante scène des douaniers. Mais surtout Franquin utilise ingénieusement un procédé narratif pour crédibiliser ces situations, le « lampshade hanging ». Cette méthode consiste à faire dire à un personnage toute l’artificialité d’une situation ou d’un comportement pour le pointer du doigt et le surligner, ce qui permet paradoxalement de le faire plus facilement accepter par le public. Ici, Spirou et Fantasio se plaignent eux-mêmes de leur manque de bol évident, créant une connivence avec le lecteur. On a tous vécu une mauvaise journée, où on a l’impression que le sort s’acharne, donc on accepte que ça soit le cas pour nos héros ici.

En outre, un des aspects les plus plaisants de cet album est son graphisme. Cet album est magnifique. Plus que ça, il est ingénieux. En effet, ce qui lie Il y a un Sorcier à Champignac, Spirou et les Héritiers et les Voleurs de Marsupilami, en plus que de créer des ponts entre les histoires et d’amener un univers cohérent, sont leur rôle d’espace de création graphique. Il y a quelque chose de passionnant à voir Franquin tester des trucs, jauger son trait et tenter de nouvelles situations ou de nouvelles mises en scène. Dans il y a un Sorcier à Champignac, Franquin jouait énormément sur les effets de perspective par exemple (les champignons gigantesques, Fantasio qui jette un bout de la fontaine sur le château au loin…). Dans les héritiers, la course automobile était l’occasion de mettre en image la vitesse. Ici Franquin joue sur le mouvement et la couleur/l’ombrage.

Il y a énormément de situations dans l’album qui ne sont là « que » pour permettre à Franquin d’aller plus loin, de proposer des choses nouvelles : toute la course-poursuite au zoo joue ainsi sur les deux aspects. Les personnages sont la plupart du temps réduits à des ombres chinoises, ce qui ramène leur posture et leurs mouvements à leurs aspects les plus élémentaires et obligeant l’auteur à une lisibilité à toute épreuve. La lampe-torche devient un outil de mise en couleur de l’album. La mise en scène est souvent au niveau des personnages, un peu comme au théâtre, de nouveau dans un souci de lisibilité. Le clou de cette partie est le moment où Fantasio cherche à utiliser une des branches de l’échelle brisée comme une perche pour sauter le mur. Le travail sur le mouvement pour faire comprendre l’action tout en la gardant hilarante est impressionnant. On notera qu’on peut également rapprocher toute la scène de la poursuite au zoo avec celle au centre commercial au début de la Corne de Rhinocéros, avec des questions dans les deux cas de gestion de l’espace (très horizontal ici, avec l’ajout de la verticalité des différents étages dans la corne de Rhinocéros).

Le deuxième « morceau de bravoure » graphique d’un album qui en regorge se situe lors de la bagarre avec les douaniers. Alors que la poursuite au zoo était très stylisée, presque expressionniste, celle avec les douaniers regorgent de détails : les mouvements, les coups (mention spéciale à la fessée du douanier à Spirou ! Hilarant !), les vêtements déchirés, les expressions des visages. Le moment le plus marquant est sans doute quand Spirou ramasse le tampon du douanier, qui l’a tant agacé, saute sur les épaules dudit douanier et se met à lui tamponner la tête ! Un gros moment de mise en scène et d’humour de situation. Impossible de ne pas souligner la scène du match de foot, qui a conquis jusqu’à Spirou et Fantasio. Là c’est l’aspect réaliste et vif du moment qui y est travaillé. C’est d’une grande crédibilité et avec un excellent découpage de l’action. Les scènes au cirque ajoutent au mouvement des enjeux de colorisation, avec « la mise en lumière » des projecteurs, et bien sûrs les effets bariolés de « Cam et Léon ». Je ne saurais d’ailleurs que trop conseiller de lire cette histoire dans les intégrales, où la colorisation me parait franchement bien plus réussie.

Tous ces travaux graphiques peuvent trouver échos dans les travaux antérieurs de Franquin : l’effet de la colorisation par exemple était travaillé dans il y a un Sorcier à Champignac lors de la scène avec les champignons phosphorescents qui créaient ces ombres fantastiques, où lors des cycles diurnes-nocturnes. C’est également le cas ici, où l’action alterne les phases de jours et les phases de nuit, modifiant les ambiances. L’aboutissement de toutes ses recherches graphiques se retrouve selon moi dans la Mauvaise Tête, mais il est évident que les Voleurs de Marsupilami sont un jalon très important vers un style graphique plus maitrisé.

Ces expérimentations graphiques et narratives sont, on l’a noté, également des reprises d’idées et de concepts antérieurs. La notion d’une « suite » à une aventure était déjà présente chez Franquin dans le diptyque Radar le Robot et les Plans du Robot. Comme ici, le lien entre les albums est évident, et le second album ne pourrait exister sans le premier. Néanmoins, à chaque fois les deux aventures sont suffisamment cloisonnées pour être appréciées seules et les faits sont rappelés très rapidement et clairement afin de pouvoir embarquer de nouveaux lecteurs (deux cases de discussion entre Spirou et Fantasio uniquement sont nécessaires ici). Cette structure formelle va conditionner l’ensemble des diptyques qu’on a pu avoir dans la série chez Franquin et Tome & Janry notamment. Fournier avec Kodo le Tyran et Des Haricots Partout proposera une petite trahison à ce cloisonnement (mais rappelons qu’à la base, l’intrigue devait courir sur cinq volumes !). Plus généralement, la construction narrative des Voleurs du Marsupilami, modèle abouti de ce qui avait été tenté avec ses deux prédécesseurs, représente également l’aboutissement de près de huit ans d’expérimentations et de travaux sur Spirou (l’Héritage date de 1946-1947, tandis que les Voleurs de Marsupilami de 1954). Il est évident lorsqu’on regarde la chronologie de publication de toutes ces histoires que la transition entre histoires courtes et histoires longues n’a pas été aussi rapide qu’on peut l’imaginer : l’Héritage, Radar le Robot et les Plans du Robot font figure de premiers jets pour les biens plus réussis Il y a un Sorcier à Champignac, Spirou et les Héritiers et les Voleurs de Marsupilami, mais ces deux groupes d’histoires sont entrecoupés de cinq histoires courtes, comme si Franquin reculait pour mieux sauter. Cela montre l’importance des Voleurs de Marsupilami, qui condense toutes les réussites de ses prédécesseurs pour proposer un album bien maitrisé, et permet de « transformer l’essai ».

(à suivre)
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Jalias
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Re: LES VOLEURS DU MARSUPILAMI

Message par Jalias »

(erratum: Comme me l'a fait remarqué le Prof., Les Voleurs de Marsupilami ont été prépubliés en 1952, directement à la suite de Spirou et les Héritiers, tandis que 1954 est la date de parution en album. Il y a donc six ans de décalage avec l'Héritage au lieu de 8)

Le fond : La loi et la morale

Tout le travail formel fourni sur cet album est au service d’une histoire aux enjeux clairs, avec des concepts forts sur le traitement animal et la moralité de nos actions, tous les deux résumés dans le titre de cet album : « les Voleurs du Marsupilami ».

La première question qu’on peut se poser avec ce titre, c’est qui sont les voleurs désignés par celui-ci ? Comme l’indique l’album lui-même dans sa conclusion, ce titre correspondant autant à Valentin Mollet et Zabaglione qu’à Spirou et Fantasio eux-mêmes ! Mollet vole techniquement le Marsupilami au zoo, mais pour le compte de Zabaglione et de ses sbires. Quant à nos héros, ils ont bien pour but avoué d’enlever le Marsupilami au zoo en début d’histoire (au même titre que Fantasio simule un cambriolage pour un reportage dans la Corne de Rhinocéros, avant d’être aux prises avec de vrais cambrioleurs !), et ils finissent bien par le voler, mais à Zabaglione.

Mais si l’ensemble des personnages principaux de cette histoire sont des voleurs, ce mot recouvre une réalité bien différente pour chaque personnage, et c’est là que se situent tous les questionnements moraux de cette histoire. Dernier voleur à apparaitre, Zabaglione est peut-être le moins intéressant. Il est entraîné par des velléités très cupides, cherchant à se faire de l’argent grâce au Marsupilami, comme nouvelle attraction de son cirque ambulant. Pas de surprise ici, un voleur vole souvent pour la valeur « marchande » de son larcin. L’histoire ne cherche pas vraiment à contextualiser ses actions (est-ce que Zabaglione a été poussé dans ses derniers retranchements pour que le cirque survive ?), et qui plus est son caractère agressif avec les humains et violent avec les animaux (ou l’inverse) le rendent tout à fait antipathique. Antipathique mais pas idiot. Zabaglione arrive à faire rapidement le rapprochement entre Cam et Léon et Spirou et Fantasio, et alors qu’il n’a qu’un temps que très limité pour se retourner, il concocte un plan pour se débarrasser des gêneurs tout en profitant des « pouvoirs » de sa nouvelle attraction. Sa figure d’ennemi est renforcée par la répétition du Z comme lettre de mauvais augure et son porteur comme version maléfique du héros, après sa première utilisation pour Zantafio dans l’album précédent ; et qui deviendra une marque de fabrique des méchants de Franquin. Je vous renvoie à l’essai très intéressant de Philippe Tomblaine sur le sujet.

Si Zantafio est le miroir déformé de Fantasio comme le Z est celui du S de Spirou, Zabaglione sert également de miroir maléfique à nos héros, qui eux cherchent à réparer leur erreur. En effet, nos héros sont avant tout guidés par le bien-être de l’animal, et le voient dépérir au zoo. On notera tout de même que la narration rechigne à les traiter de voleurs : en début d’intrigue, Fantasio ne parle que de « rendre sa liberté » au Marsupilami, et les deux personnages n’ont même pas le temps de fomenter un plan que le Marsupilami « meurt ». Une fois Zabaglione révélé, Spirou, Fantasio et même Zabaglione utilisent le verbe « reprendre » pour décrire le but de nos héros, ce qui est techniquement incorrect : le Marsupilami n’étant pas à eux depuis qu’ils en ont fait don au jardin zoologique, ils ne peuvent pas vraiment le reprendre (surtout qu’ils n’ont pas l’intention de le ramener au zoo). Seule maigre concession, sur la dernière planche, on dit bien : « c’est ainsi que le Marsupilami fut « volé » une dernière fois » (avec les guillemets dans le texte). On sent également une certaine maladresse dans leurs justifications. Ainsi, ils promettent à Valentine Mollet de ne pas appeler la police pour éviter des ennuis à son mari, oubliant de dire au passage qu’ils n’ont aucun intérêt à impliquer ladite police vu qu’ils ne comptent pas ramener le Marsupilami au zoo. Cette euphémisation un peu maladroite des actions de nos héros n’est pas selon moi une forme d’autocensure bienséante, mais sert un double discours.

Le premier est un questionnement et un positionnement sur la justice et la morale. Si ce que préparent nos héros est légalement répréhensible, il est dans le choix de vocabulaire décrit comme moralement juste. Dans l’univers de Spirou, le bien l’emporte sur le droit, et on dit implicitement au lecteur de réfléchir à ce qui est bien ou mal avant de prendre une décision, et pas forcément à ce qu’on a le droit ou non de faire. Mais le récit rappelle plusieurs fois la difficulté pour Spirou et Fantasio de voler le Marsupilami (difficulté technique et légale). Cela responsabilise notre héros et son lectorat, il est important de faire le bien, même (et surtout) si ce n’est pas facile. C’est en outre très cohérent avec l’histoire du groom et de son journal, notamment son image de résistant durant la seconde guerre mondiale, où cette fois encore la morale primait sur la loi. On notera d’ailleurs l’importance des émotions et de l’empathie dans le jugement de nos héros, et plus particulièrement Fantasio : c’est parce qu’il voit le Marsupilami déprimé qu’il prend la décision de le voler. Et lorsque Zabaglione fouette l’animal dans le cirque, Fantasio menace clairement de lui casser la figure. Emotivité saine la plupart du temps, mais parfois puérile et bien moins moralement juste comme lors de la scène des douaniers, où nos héros sont très loin du modèle vertueux hergéen. Ce n’est pas parce que la justesse de leur motivation est clairement mise en avant que nos héros en deviennent des saints pour autant.

Mais j’ai dit qu’il y avait deux raisons à l’euphémisation du statut de voleurs de nos héros. La deuxième, liée à la première est de renforcer la dichotomie entre Zabaglione (les méchants) et Spirou et Fantasio (les gentils) pour marquer les deux extrêmes de la morale et permettre l’évolution du personnage sans doute le plus important de cette histoire (avec le Marsupilami), Valentin Mollet. Si les autres personnages sont coincés dans des valeurs morales figées, Valentin représente la zone grise, celle avec laquelle on se débat tous les jours. Faux méchant mais vrai paumé, Valentin s’est laissé embringuer par Zabaglione, sa part obscure. Contrairement à Zabaglione, Mollet a une conscience morale, il pense juste ne pas avoir le choix. Lui et sa femme restent des figures archétypales, lui celui du pauvre type un peu paumé mais qui a bon fond et plus talentueux que ce qu’on pourrait voir, elle celle de la femme épleurée mais avec de la ressource. C’est pour renforcer cette image de monsieur et madame tout le monde qu’ils s’appellent Valentin et Valentine, soient les prénoms les plus génériques qui soient pour désigner des amoureux. Valentin Mollet ça peut être n’importe qui. C’est un être ni totalement bon, ni purement mauvais. L’ambivalence du personnage est clairement mise en avant dans le dialogue donné en citation : il émet des remords, indique qu’il n’a pas de choix, et fait montre d’empathie pour ses poursuivants. En un dialogue, Franquin signale donc qu’il ne s’agit pas d’un personnage à détester mais à ramener dans la lumière (et le fait qu’il n’est montré d’abord que dans l’ombre est éminemment symbolique, bien entendu). La scène des larmes de sa femme permet de ramener de l’empathie pour le personnage et le présentant par quelqu’un qui l’aime, et la scène de foot a pour but de justifier son athlétisme, mais surtout de le rendre bien plus sympathique à nos héros emportés par ses exploits sportifs (Franquin avait utilisé exactement la même méthode avec selon moi une réussite plus mitigée avec le Comte dans Il y a un Sorcier à Champignac), et donc au lecteur. Mais c’est surtout l’évolution du personnage qui est plaisante : il passe ainsi d’une ombre fuyarde à un personnage contrasté et surtout la fin donne une vraie rédemption au personnage lorsqu’il affronte son « démon », Zabaglione, pour aider nos héros. Et le vainc, s’attirant un « bravo » bien mérité de son « ange » Spirou.

Il est du reste intéressant de noter que si c’est Mollet qui bat Zabaglione, c’est le Marsupilami qui met KO Goliath, et Spip qui se débarrasse du chef du personnel. Il n’est pas anodin que ce soient des animaux qui affrontent (et battent) des humains qui se sont montrés cruels envers eux, car outre que ces scènes sont très drôles, elles participent à la deuxième thématique centrale de l’album : le traitement réservé aux animaux. L’utilisation d’animaux comme objet de divertissement pour les humains est quelque chose qui révoltait Franquin, et il n’est pas surprenant que les humains qui se nourrissent de ce commerce soient présentés au mieux comme incompétent (le directeur du zoo qui ne semble pas voir la dépression évidente du Marsupilami dans sa cage), au pire comme foncièrement mauvais (Zabaglione qui ne pense qu’à dompter le Marsupilami).

Le Marsupilami, deuxième élément centrale du titre de l’album est évident le point de convergence de ce thème. Grâce à son anthropomorphisme, et notamment sa capacité à rire, mais également à se mettre en colère et donc ici à déprimer, il rend la situation des animaux en cage bien plus insupportable pour le lecteur et nos héros. Ainsi, la nouvelle de sa mort, même factice, est forte et amène un peu de gravité dans cet épisode. S’il est un élément central de l’album, il n’en reste néanmoins que très peu présent physiquement. On ne le voit qu’au tout début, puis lors du spectacle de cirque, avant la toute fin. La scène du spectacle au cirque est néanmoins absolument marquante, et cristallise bien tout ce que Franquin reproche à l’univers du divertissement animalier. Ainsi, je parlais d’anthropomorphisme de l’animal plus haut, mais c’est bien son côté « animal » qui est mis en avant ici, avec une peur irrationnelle qui s’éveille chez lui, très bien retranscrite par l’image. Il a l’air véritablement terrifié. Heureusement, le Marsupilami n’est pas n’importe qui, et à la violence du fouet répond celle de la queue de l’animal ; l’humour de cet « arroseur arrosé » permettant de contrebalancer la gravité de la situation.

La limite du procédé est par contre évidente, on ne s’émeut que du sort du Marsu, alors que tous les autres animaux qu’on voit au zoo (le varan) comme au cirque (les éléphants, le tigre) ne sont présentés que comme des éléments comiques. Néanmoins, tous ces animaux présentent des pensées cohérentes (et souvent drôles), ce qui permet d’étendre cette question du traitement des animaux à toutes les espèces ; en même temps qu’il justifie la « capacité de parole » (donc de penser) de Spip dans cet univers. D’ailleurs, si ce dernier reste assez effacé comme (trop) souvent chez Franquin, sa scène avec la fille des Mollet participe également aux thèmes de l’épisode (non, les animaux ne sont pas des jouets), dans un registre beaucoup plus humoristique et léger bien sûr.

On peut constater que les deux thématiques de l’épisode sont traitées avec une certaine légèreté (et pas une certaine superficialité). L’humour sert, comme toujours chez Franquin, de vecteur de réflexion (les pensées des animaux, le comportement du Marsupilami, les péripéties de Spirou et Fantasio), mais sans le côté « acerbe » voire « cynique » qu’il développera vers la fin de son travail sur la série ou dans les idées noires. C’est un humour assez franc finalement, à l’image de cet album, qui par rapport à ce qu’il proposera dans la suite de la série peut manquer d’une certaine subtilité. Les thèmes sont simples, clairs et traités encore une fois avec une certaine franchise.

On peut donc conclure que les Voleurs de Marsupilami est un épisode réellement solide. Solide formellement car il capitalise sur l’ensemble de l’expérience antérieure acquise par l’auteur pour mieux structurer son récit tout en proposant une œuvre graphique de qualité ; mais également car c’est une histoire limpide avec un propos clair et bien amené. C’est une œuvre qui respecte son public, ne le prend pas pour plus idiot qu’il n’est, et peut donc faire passer ses messages par l’image et la narration, sans avoir besoin d’appuyer son propos par des longues tirades explicatives balourdes. Néanmoins la relative simplicité de ses thèmes (ou tout du moins des réflexions soulevées par la lecture) peut amener une expérience moins marquante que certains albums ultérieurs ; ou que ses prédécesseurs pourtant moins maitrisés. C’est tout de même pour moi un solide 4/5 !
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